Les humains ont toujours utilisé les plantes pour se nourrir et se soigner, un savoir ancestral qui s'est transmis de génération en génération. Cependant, pour beaucoup d'entre nous, le lien qui nous unissait autrefois à la nature s'est distendu, et nous la percevons désormais avec une certaine appréhension. Pour Signe Siemsen, herboriste, doula et artisane établie à Stockholm, le lien avec le monde naturel permet de guérir et de renouer avec l'essence même de l'être humain.
Signe Siemsen se considère comme une herboriste et, d'aussi loin qu'elle se souvienne, elle a toujours ressenti un lien intuitif avec la nature sauvage. À l'âge de dix ans, elle voulait devenir sorcière, inspirée par les élixirs végétaux qu'elle avait découverts dans des livres. À 20 ans, elle travaille en boîte de nuit et, pour s'évader, elle passe régulièrement la journée dans la forêt afin de se ressourcer et de renouer avec le monde vivant.
La phytothérapie est une pratique qui consiste à utiliser des plantes à des fins de guérison et de bien-être. Son principe repose sur le lien qui existe entre le corps, l'esprit et l'environnement. Si cette pratique était autrefois aussi courante que vitale, elle peut aujourd'hui paraître singulière, voire marginale.
« Nous avons toujours cueilli des plantes pour nous nourrir et nous soigner, et je ne fais pas de distinction claire entre les deux », explique Signe. « Je pense que nous naissons avec une connaissance innée de ce qui est bon pour notre corps, mais on nous apprend à l'ignorer dès notre plus jeune âge. Beaucoup de gens ont peur de la nature, mais nous sommes la nature, nous n'en sommes pas séparés. La vie moderne nous a appris à nous comporter comme si la nature nous était étrangère, et nous craignons ce qui nous semblait autrefois naturel.
La pratique de phytothérapie suit un rythme annuel bien établi. Le printemps, l'été et l'automne sont des périodes intenses de cueillette, de séchage, de fermentation et de préparation de teintures. Son objectif est de transformer et de préserver autant que possible les vertus des plantes.
Les feuilles d'ortie, riches en vitamines, en calcium, en fer et en minéraux, sont séchées et utilisées en infusion pour contribuer au bon fonctionnement et au renforcement du système immunitaire. La rose sauvage peut « adoucir et guérir le cœur » et est « excellente pour la fertilité, l'amour, le sexe et la passion ». Elle possède également des propriétés hydratantes et antiseptiques. Les feuilles de framboisier sauvage fermentées et séchées sont utilisées comme base dans la plupart des tisanes et des infusions. Elles stimulent les défenses naturelles, contribuent à l'équilibre hormonal et soulagent les douleurs menstruelles. D'après Signe, bien que ces remèdes puissent être préparés et utilisés toute l'année, l'hiver est généralement le moment où le corps en a le plus besoin.
« À mon sens, une grande partie du pouvoir guérisseur des plantes provient du lien qu'on établit avec elles, du traitement auquel nous les soumettons et du simple fait de les côtoyer au quotidien. Parfois, j'ai l'impression que je n'ai même pas besoin de cueillir une plante pour profiter de ses bienfaits. Il suffit d'être en sa présence.
« Je suis vraiment attirée par la nature, mais j'aime également les plantes cultivées. Elles sont issues d'une graine que quelqu'un a plantée avec amour et qui en a pris soin. Toutefois, je pense que les plantes sauvages ont plus de propriétés médicinales, car elles ont dû surmonter beaucoup plus de défis et n'ont pas été choyées de la même façon que les plantes cultivées de la main de l'homme.
Signe organise des cours, des ateliers et des promenades de cueillette pour encourager les participants à se fier à leurs propres capacités dans la nature, ainsi qu'à aborder leur environnement naturel comme le ferait un enfant.
« Je n'ai jamais vu mes enfants mettre quoi que ce soit de toxique dans leur bouche. Ils sont intuitivement attirés par les plantes inoffensives, qui peuvent être cueillies sans danger. C'est inné, nous sommes tous ouverts et curieux. Les enfants se fient à leurs propres sens. Pour eux, ils font partie de la nature et n'en sont pas séparés. D'après moi, il est essentiel de faire confiance aux enfants lorsqu'ils découvrent le monde. Il faut encourager leur ouverture d'esprit et leur apprendre à se fier à leur intuition. »
Signe ajoute que cette approche est valable pour les adultes, et c'est pourquoi elle évite en général de donner des recommandations spécifiques ou même de simples conseils à propos de la nature. « Je trouve cela très vivifiant de pouvoir écouter mon intuition et d'oublier l'idée que quelqu'un d'autre sait toujours mieux ce qui est bon pour moi. Tout le monde est capable de trouver ses plantes de prédilection en se promenant parmi elles, sans les observer de près ni rechercher activement quelque chose, mais en essayant plutôt de lâcher prise.
Essayez de prendre le temps de vous asseoir à côté d'une plante et de ressentir sa présence sans vous précipiter. À quoi ressemble-t-elle au printemps, en été et en automne ? Comment se fane-t-elle et à quoi ressemblent ses graines ? Comment son goût et son odeur évoluent-ils tout au long des saisons ?
« Être humain, c'est construire sa vie et son environnement. On le fait au contact des autres et de tout ce qui nous entoure. On ne peut pas y parvenir sans interagir en permanence avec notre milieu. C'est donc paradoxal qu'on se coupe autant de ce processus pour nous nourrir, nous habiller et vivre notre vie au quotidien. Je ne dis pas qu'on devrait tous construire notre propre maison, fabriquer nos propres vêtements ou trouver notre nourriture, mais je pense que nous pourrions nous rapprocher de ce concept. Nous avons tous des compétences et des capacités différentes, mais si chacun d'entre nous pouvait créer quelque chose avec ce qui nous entoure, je pense qu'on se sentirait bien mieux et qu'on retrouverait le lien qui nous manque. »